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AGRO-BIO - 330 - 02

LA MOUCHE DE LA POMME

Table des matières

______________________________

Par Jean Duval, agr., M.Sc.
août 1991

MOYENS DE LUTTE CONTRE LA MOUCHE DE LA POMME

GÉNÉRALITÉS

Les larves de la mouche de la pomme (Rhagoletis pomonella - apple maggot fly) peuvent causer des dommages considérables en pomiculture, allant jusqu'à ruiner totalement une récolte, là où aucun moyen de contrôle n'est exercé. L'hôte original de cet insecte indigène à l'Amérique du nord est l'aubépine, le pommier n'ayant été introduit sur le continent que par les colons. Au Québec, il aura fallu jusqu'au début du siècle pour que la mouche de la pomme devienne un ravageur des pommiers, d'abord dans la région de Montréal et puis peu à peu vers le nord et l'est de la province (19).

Description

La mouche de la pomme est plus petite que la mouche domestique. Les femelles sont noires et mesurent 5,2 à 6 mm de long alors que les mâles sont encore plus petits. Les adultes ont quatre bandes blanches sur l'abdomen et sont marqués de bandes noires sur les ailes qui forment un W caractéristique.

Cycle de vie

Au Québec, les mouches adultes commencent à émerger du sol entre le 20 juin et le 5 juillet, soit lorsqu'il s'est accumulé 450 degré-jours au-dessus de 9C (11). La majorité des adultes apparaissent vers le milieu et la fin de juillet.

Les adultes immatures se nourrissent du miellat produit par les pucerons sur le feuillage des pommiers. De 7 à 10 jours après l'émergence, les adultes sont prêts pour la reproduction et se rassemblent sur les fruits. Chaque femelle pond environ 300 oeufs durant sa vie qui dure une trentaine de jours. Au rythme d'un oeuf par fruit, une seule femelle peut endommager près de 300 fruits, ce qui explique que les seuils de tolérance soient très bas pour la mouche de la pomme.

Les oeufs sont déposés sous la peau de la pomme et éclosent de 2 à 10 jours après la ponte. Les larves ou asticots passent de 20 à 30 jours dans le fruit puis ils tombent au sol où elles deviennent pupes et hivernent à environ 5 cm sous la surface.

Il n'y a qu'une génération par année.

MOYENS DE LUTTE

Piégeage

On considère deux types de pièges, soit les pièges visuels et les pièges olfactifs.

Pièges olfactifs

Plusieurs appâts olfactifs permettent d'attirer la mouche de la pomme pour en faire le dépistage. Voici quelques recettes d'appâts:

Fermentation sucrée (22)

  • - Mélanger une partie de mélasse ou de malt pour 9 parties d'eau
  • - Ajouter des levures pour aider à la fermentation
  • - Laisser fermenter pendant 48 heures ou jusqu'à la fin de la fermentation
  • - Mettre le liquide dans un pot à large col et suspendre dans l'arbre à hauteur d'épaule du côté ensoleillé de l'arbre.
  • Appât mis au point par des chercheurs de l'Université du New Hampshire

  • - Mélanger 10 ml d'ammoniaque et 1/4 de c. à thé de savon en poudre dans un 1 litre d'eau
  • - Mettre la solution en pot et suspendre à hauteur d'épaule du côté ensoleillé de l'arbre (on doit changer la solution chaque semaine)
  • Miellat synthétique (7)

  • - Un mélange d'acétate d'ammoniaque et d'hydrolisat de protéines est ce qui imite le mieux l'odeur du miellat, l'aliment préféré des mouches adultes immatures. Il s'agit donc d'un piège olfactif très efficace.
  • L'appât olfactif le plus efficace pour attirer la mouche est la phéromone synthétique. Malheureusement, l'inconvénient des pièges olfactifs et des pièges à phéromones plus particulièrement est qu'ils attirent les mouches provenant même de l'extérieur du verger. Dans une optique de dépistage, les pièges visuels sont donc préférables.

    Pièges visuels

    Les pièges visuels les plus efficaces qui sont maintenant disponibles sur le marché sont de deux types:

  • - Une surface jaune fluorescente de forme rectangulaire qui imite un super feuillage et enduite de matière gluante (ex: Tanglefoot, Tangletrap). Une surface jaune et noire en damier est encore plus efficace selon les études de Prokopy (13). L'addition de miellat synthétique améliore aussi l'attirance de ces pièges;
  • - Une sphère rouge, violette ou noire de 7,5 à 10 cm de diamètre et engluée. Pour les mouches, cette sphère représente la pomme de leurs rêves. Il est important d'enlever les captures sur les sphères et de renouveler l'enduit lorsque les pièges sont trop pleins soit toutes les deux à quatre semaines. La compagnie Gardener's Supply qui vend des pièges sphériques suggère d'appliquer un peu plus de glu au-dessus de la sphère et un peu moins au-dessous.
  • Les rectangles jaunes attirent les adultes immatures qui recherchent le feuillage pour se nourrir. La sphère rouge attire les adultes matures qui préfèrent les fruits pour la reproduction. C'est pourquoi les deux types de pièges sont souvent utilisés en conjonction. En verger commercial, la sphère rouge est le seul type de piège utilisé.

    On trouve sur le marché des pièges combinant la sphère et le rectangle (voir adresses utiles à la fin).

    Les pièges visuels devraient être installés dès la troisième semaine de juin ou à 500 degrés-jours au-dessus de 5C.

    La position des pièges est critique dans le cas des pièges visuels. On conseille de les accrocher sur une branche de plus d'un 1,3 cm de diamètre du côté sud de l'arbre à hauteur de tête (1,65 à 2,5 mètres de hauteur). Le piège doit être visible de tous côtés et pour cela on doit enlever le feuillage dans un rayon de 30 à 60 cm du piège. Idéalement, il doit aussi y avoir abondance de fruits et de feuilles dans la zone du piège. Pour certaines variétés comme la Red Delicious, les branches chargées de fruits ont tendance à s'affaisser et on peut avoir à replacer les pièges de façon à les garder exposés au soleil.

    Bien que les pièges visuels soient avant tout utilisés pour le dépistage, il est possible de les utiliser pour le contrôle de la mouche de la pomme. Prokopy (15) affirme qu'on peut obtenir moins de 10% de fruits piqués dans un verger de 150 arbres ou moins en plaçant six pièges sphériques par arbre standard. Buriff (4) conseille quant à lui une combinaison de sphères rouges et de rectangles jaunes à raison d'un piège pour 100 pommes. Ball (1) suggère deux sphères pour un arbre de moins de 2,7 mètres.

    On peut se faire des pièges sphériques bon marché en utilisant des boules de croquet (14) ou même des pots d'aliments pour bébé (20) qu'on peint avec une peinture rouge ne contenant aucune pigmentation de blanc (ex: l'émail rouge foncé Tartar de la compagnie Sherwin-William). Il suffit d'insérer une vis-anneau dans les boules de croquet ou d'effectuer deux perforations dans le couvercle des pots pour pouvoir accrocher les sphères aux arbres à l'aide d'une broche d'une trentaine de centimètres de longueur. Les boules sont enduites de Tanglefoot ou encore mieux de Bird Tanglefoot qui est une glu plus puissante. L'enduit peut être enlevé des sphères avec du kérosène et les boules réutilisées chaque année.

    Moyens de lutte culturaux

    Hygiène du verger

    Les vergers abandonnés, les pommetiers et les aubépines sont des abris idéaux pour la mouche de la pomme. On conseille de les détruire dans un rayon d'un kilomètre du verger lorsque cela est possible.

    Il est important de ramasser les fruits tombés régulièrement afin d'éviter que les larves ne pénètrent le sol. Le ramassage se fait idéalement deux fois par semaine pour les variétés hâtives et une fois par semaine pour les variétés d'automne (22). Des moutons pourraient être utiles à ce propos ainsi que pour l'entretien du couvre-sol.

    Régie du sol

    A l'automne, Ball (1) recommande un travail du sol superficiel à la base des arbres de façon à laisser le sol à nu pendant deux semaines. Par après on implante un couvre-sol ou on applique un paillis. En pratique, cette méthode est peu réaliste, le temps manquant en automne.

    Choix des variétés

    Le choix des variétés est important dans le contrôle de la mouche de la pomme. Certaines variétés particulièrement susceptibles comme Duchesse, Fameuse, Jaune transparente et Wealthy devraient d'ailleurs être délaissées (19). On devrait considérer ces facteurs à l'établissement d'un nouveau verger.

    Bien que les mouches ne soient pas attirées principalement par l'odeur des pommes, Prokopy et al. (17) ont démontré qu'elles étaient attirées par l'odeur des fruits mûrs des variétés susceptibles.

    Le choix de la variété a aussi de l'importance par rapport au degré de dégâts occasionnés par les asticots. En général, les larves se développent plus rapidement et la mortalité est moindre dans les variétés hâtives et à peau molle que dans les variétés tardives et à peau dure.

    Les variétés de pommes à cuire sont aussi moins sensibles à la mouche de la pomme que les variétés plus sucrées.

    Une pomme très résistante à la mouche de la pomme est la variété Idared, une pomme de conservation excellente qu'on cueille à la mi-octobre (6).

    Pour le dépistage, les variétés hâtives comme Prima sont toutes indiquées pour y accrocher des pièges.

    Moyens de lutte biologiques

    Selon une étude ontarienne réalisée dans un verger non traité (9), les prédateurs sont peu efficaces contre les oeufs, les larves et les adultes de la mouche de la pomme. De plus, les parasites des oeufs et des larves n'empêche pas le dommage fait aux fruits par la mouche lors de la ponte.

    Monteith (9) indiquait cependant que le stade de pupe est plus vulnérable au contrôle biologique. Les criquets détruisent plus de la moitié des pupes en fin d'été et au début de l'automne et un autre quart de la population est détruite par d'autres prédateurs comme les fourmis au printemps et à l'automne. La même étude démontrait que les insecticides, et non les acaricides et les herbicides, affectaient les prédateurs des pupes.

    Autres moyens de lutte

    Insecticides végétaux et autres

    La mouche de la pomme est tuée par le ryania, le pyrèthre, la roténone et la terre diatomée. L'utilisation massive de ces produits est tout autant sinon plus dommageable que l'emploi de l'Imidan, un insecticide chimique biodégradable et moins dangereux pour les insectes bénéfiques. Denis Culley, un pomiculteur biologique du Maine, observe les populations de mouches sur les sphères rouges tous les jours. Dès qu'il observe une augmentation importante du nombre de captures, il administre un seul traitement à la roténone et se satisfait de ce contrôle (8). Plus rigoureusement, on considère qu'un seul adulte par piège est le seuil de tolérance à respecter au Québec ou un total de quatre pour quatre pièges à raison d'un piège par cinq acres. Après un premier traitement insecticide, le seuil de tolérance passe à deux mouches par piège. En Nouvelle-Angleterre on tolère jusqu'à cinq mouches par piège lorsque les pièges sont installés en abord du verger (21).

    Répulsifs

    La bouillie bordelaise découragerait la ponte des femelles selon des études réalisées par Susan Opp de l'Université du Massachusetts. Les mouches n'aiment probablement pas les résidus sur les fruits. Toujours au stade de recherche, l'inondation du verger au moyen de phéromones d'oviposition de la mouche permettrait de confondre les femelles et de diminuer ainsi le taux de ponte.

    Adresses utiles

    Ladd Research Industries

    PO Box 1005

    Burlington, Vermont

    05402

    Manufacture des pièges rectangles-sphères supposément très efficaces.

    La compagnie Plant Prod ltée

    2000 Berlier

    Laval, Qc

    H7L 4S4 (514)745-0208

    Distribue les sphères rouges et les rectangles jaunes de la compagnie californienne Zoecon sur demande (pièges Pherocon AM).

    Pépinière des Aulnaies enr.

    1167 de la Seigneurie

    St-Rock-des-Aulnaies, Qc

    G0R 4E0 (418)354-2940

    Pommes-pièges rouges

    Bibliographie

    1. Ball, Jeff. 1988. Rodale's garden problem solver:vegetables, fruits, and herbs. Rodale Press, Emmaus, Pennsylvania. 550 pages.

    2. Bérard, Aline, Julie Boulé et Jean-Jacques Marcil. 1991. Guide de protection et d'entretien écologique des pommiers et autres arbres fruitiers. Regroupement pour le jardinage amateur et écologique (R.J.A.E.), Granby, Québec.

    3. Boller, E.F. et R.J. Prokopy. 1976. Bionomics and management of Rhagoletis. Annual Review of Entomology, 21:223-246.

    4. Buriff, C.R. 1973. Recapture of released apple maggot flies in stickyboard traps. Environmental Entomology, 2(5):757-758.

    5. Chagnon, Madeleine et André Payette. 1990. Modes alternatifs de répression des insectes dans les agro-écosystèmes québécois.Tome 1:Document synthèse. Québec. Ministère de l'Environnement et Centre Québécois de Valorisation de la Biomasse. 81 pages.

    6. Hall-Beyer, Bart. 1986. Fruits et petits fruits. Humus, janvier-février 1986, page 35.

    7. Hodson, A.C. 1948. Further studies of lures attractive to the apple maggot. Journal of Economic Entomology, 41:61-66.

    8. Lamb, Jane. 1990. Denis Culley:organic orchardist. Maine Organic Farmer and Gardener, 17(6):8-9.

    9. Monteith, L.G. 1976. Field studies of potential predators of the apple maggot Rhagoletis pomonella in Ontario. Proceedings of the Entomological Society of Ontario, 107:23-30.

    10. Page, Stephen et Joseph Smillie. 1986. The orchard almanac. Spraysaver Publications, Rockport, Maine. 145 pages.

    11. Paradis, R.O. 1983. Pest management approach in Quebec apple orchards. Direction générale de la recherche, Agriculture Canada, Ottawa. 49 pages.

    12. Prokopy, R.J. 1972a. Evidence for a marking pheromone deterring repeated oviposition in apple maggot flies. Environmental Entomology, 1(3):326-332.

    13. Prokopy, R.J. 1972b. Response of apple maggot flies to rectangles of different colors and shades. Environmental Entomology, 1(6):720-726.

    14. Prokopy, R.J. 1975. Apple maggot control by sticky red spheres. Journal of Economic Entomology, 68(2):197-198.

    15. Prokopy, R.J. 1976. Sticky red spheres for trapping apple maggot flies. Fruit notes, novembre-décembre 1976, pages 6 à 9.

    16. Prokopy, R.J. et G.L. Bush. 1973. Ovipositional response to different sizes of artificial fruit by flies of Rhagoletis pomonella species group. Annals of the Entomological Society of America, 66(5):927-929.

    17. Prokopy, R.J., V. Moericke et G.L. Bush. 1973. Attraction of apple maggot flies to odor of apples. Environmental Entomology, 2(5):743-749.

    18. Richard, Jean. 1987. Production écologique:fruits et petits fruits. Editions Marcel Broquet, LaPrairie, Québec. 337 pages.

    19. Rivard, Irenée. 1973. Inventaire historique sur les fluctuations de population de la mouche de la pomme, Rhagoletis pomonella, dans le Sud-Ouest du Québec. Annales de la Société Entomologique du Québec, 18(3):126-137.

    20. Turner, L. 1991. Apple maggot traps. Truc d'un lecteur de la chronique "Garden to Garden". Organic Gardening, 38(5):85.

    21. United States Department of Agriculture. 1990. Management guide for low-input sustainable apple production. Publié par le Northeast Low-Input Sustainable Agriculture Apple Production Project de l'USDA. 84 pages.

    22. Yepsen, R.B. 1984. The encyclopedia of natural insect and disease control. Rodale Press, Emmaus, Pennsylvania. 490 pages.

    MISE-EN-GARDE

    Ce document a pour but de faire la synthèse de l'information scientifique et populaire disponible sur le sujet traité, dans une perspective d'agriculture biologique. Il ne s'agit donc pas de recommandations ou d'un guide de production.

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