UTILISATION DU RADIS HUILEUX EN ALIMENTATION ANIMALE

par Jean Duval, agr., M.Sc.
novembre 1995

Bien que souvent confondus, on peut distinguer deux sortes de radis utilisés en alimentation animale, soit le radis fourrager (Raphanus sativus) et le radis huileux (Raphanus sativus var. oleiformis). Le radis fourrager consiste en des variétés développées spécifiquement pour leur fort développement racinaire; c'est en effet la racine qui est alors donnée comme fourrage. Les variétés de radis huileux ont des racines moins développées et produisent par conséquent plus de feuillage. Il sera ici question du radis huileux et de l'utilisation de son feuillage en alimentation animale.

Radis huileux vs autres plantes fourragères

Le feuillage des crucifères est en général plus riche en Ca, P, S et surtout K et plus faible en Mg et en Fe lorsqu'on le compare avec celui des graminées et des légumineuses fourragères (Grbesa et al., 1992).

En comparaison avec d'autres crucifères, le radis présente des avantages et des désavantages. Du point de vue de l'alimentation animale, il est généralement moins appétent et moins productif que d'autres plantes comme le colza fourrager ou le chou frisé. Il serait aussi moins intéressant en conditions sèches. Son grand avantage réside dans son développement très rapide, atout important comme culture de fin de saison. Il est aussi résistant à l'hernie, maladie qui touche un grand nombre de crucifères. Le radis est également plus riche en N que les autres crucifères fourragères.

Valeur alimentaire

La valeur alimentaire du radis dépend de la date de semis et de la date de récolte. Plusieurs études menées au Canada et dans d'autres pays nordiques indiquent que pour maximiser la valeur alimentaire et le rendement du radis, il est péférable de le semer avant la mi-juillet (Kunelius et al., 1987) et au plus tard au début d'août. Les ensemencements en fin d'août réalisés à l'Ile-du-Prince-Edouard résultaient en des diminutions de 38% des rendements.

Le moment de récolte a encore plus d'importance sur la valeur alimentaire. Kunelius et Sanderson (1990) ont comparé cette valeur pour des radis semés en mi-juillet et récoltés à 46, 75 ou 101 jours après le semis. Le rendement en matière sèche était près du double à la date tardive de récolte (mi-octobre) en comparaison avec la date hâtive (fin août). Par contre, du point de vue minéral, plus le feuillage du radis était récolté tard, plus il était pauvre en N, P, Mg, Fe et Zn. Le K, S, Ca, B, Cu et Mn étaient peu affectés par la date de récolte. La digestibilité s'améliorait légèrement avec les dates plus tardives de récolte.

Appétence

L'appétence du radis diminue très rapidement dès le début de la floraison, ce qui ne laisse que deux à trois semaines d'utilisation possibles comme fourrage ou pâturage (Lampkin, 1990). Un chercheur allemand (Berendonk, 1985) a comparé l'appétence de différentes variétés de radis et de colza données en pâturage à des bovins. Il a conclu que les bovins préfèrent de beaucoup le colza au radis et que parmis les variétés de radis testées, les bovins préféraient les variétés qui ont un haut rapport feuilles:tiges.

Le contenu en sulfoxide de S-methylcystéine (SMCO) des crucifères fourragères est un facteur qui a préoccupé certains chercheurs en raison des risques potentiels de toxicité pour les ruminants (anémie hémolytique ou anémie des brassicas). Il s'est avéré que les concentrations de SMCO dans le feuillage des différentes crucifères n'atteint pas des niveaux critiques pour les ruminants (Smith, 1980).

Ensilage

Il est difficile d'utiliser le radis huileux comme ensilage pur en raison de sa faible teneur en matière sèche. Si on le récolte plus tard, pour augmenter le contenu en matière sèche, il y a perte de minéraux, donc perte de valeur nutritive.

Tableau 1 - Contenu en MS du radis à différents stades

Stade	Matière sèche (%)

Début floraison	9,4
Début maturité des fruits	11,0
Mi-maturité des fruits	13,9
Fin maturité des fruits	15,4%

Source: Mosin, 1985

Mélanges

Dans les régions très nordiques, on utilise le radis comme ensilage en mélange avec d'autres plantes, habituellement des graminées. Les plantes sont alors semées simultanément au printemps ou après une récolte de céréales récoltées pour l'ensilage au stade laiteux. L'inclusion de graminées permet d'augmenter la MS du mélange tout en gardant une bonne valeur alimentaire. Les rendements sont supérieurs avec ces mélanges que pour les céréales seules ou les mélanges céréales-légumineuses.

Des chercheurs norvégiens conseillent un mélange raygrass-radis, le raygrass ayant l'avantage de repousser plus rapidement que le radis après une première coupe. En Sibérie, le mélange avoine-radis est recommandé et s'est avéré supérieur au mélange seigle-radis du point de vue de la valeur alimentaire (Korolev, 1989). Tupitsyn et al.(1990) ont déterminé que la proportion idéale pour des mélanges avec radis huileux est de 2,25 millions de graines à l'hectare de radis (?kg/ha) et 75% du taux de semis normal de l'autre culture, par exemple 5 millions de graines hectare pour l'avoine (? kg/ha).

Bibliographie

Berendonk, C. 1985. [Grazing studies on oil radish and swede varieties]. Wirtschaftseigene Futter, 31(2):165-173.

Grbesa, D., Z. Crnojevic, Z. Laskarin et J. Posavac. 1992. [Mineral composition of some fresh herbages from grasses, legumes and cruciferae and its value for ruminants]. Krmiva, 34(3):127-134.

Korolev, F.P. 1989. [Mineral composition of feeds in the Lake Baïkal area of Buryatskaya SSR]. Sibirskii Vestnik Sel'skokhozzyaistvennoï Nauk, n3:54-58.

Kunelius, H.T., J.B. Sanderson et P.R. Narasimhalu. 1987. Effect of seeding date on yields and quality of green forage crops. Canadian Journal of Plant Science, 67:1045-1050.

Kunelius, H.T. et J.B. Sanderson. 1990. Effect of harvest dates on yield and composition of forage rape, stubble turnip, and forage radish. Applied Agricultural Research, 5(3):159-163.

Lampkin, N. 1990. Organic Farming. Farming Press, Ipswich, Royaume Uni.

Mosin, T.D. 1985. Sibirskii Vestnik Sel'skokhozzyaistvennoï Nauk, n4: 106-108.

Smith, R.H. 1980. Kale poisoning: the Brassica anaemia factor. Veterinary Record, 107:12-15.

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