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AGRO-BIO - 330 - 05

LA TORDEUSE À BANDES OBLIQUES

Table des matières

____________________________

Par Jean Duval, agr., M.Sc.
mars 1992

LA TORDEUSE A BANDES OBLIQUES

GÉNÉRALITÉS

Description

La tordeuse à bandes obliques (Choristoneura rosaceana -Obliquebanded leafroller) est un papillon de nuit de la famille des tortricidés répandu partout en Amérique du Nord. L'espèce s'attaque à plusieurs espèces de plantes mais préfère les membres de la famille des rosacées, en particulier les arbres fruitiers, les framboisiers et les rosiers. L'adulte est gris-brun ou brun ocre et mesure un peu plus de 12 mm de long et 20 mm de voilure. Sa couleur est toutefois très variable ce qui rend l'identification au champ difficile.

La chenille verte à vert pâle de 1.2 à 2.5 cm de long possède une tête noire et des espèces d'écailles au niveau du thorax. Les oeufs sont vert et déposés en masse sous les feuilles.

Cycle de vie

La tordeuse à bandes obliques hiverne au stade larvaire sous l'écorce ou au niveau d'un embranchement. Vers la mi-mai, lorsque les nouvelles pousses éclosent, la larve se réveille, perce les bourgeons et s'en nourrit pour ensuite s'attaquer aux jeunes fruits et devenir ainsi un papillon adulte. Les larves ont tendance à s'enrouler dans les feuilles, à se bâtir une petite cachette qu'elles entourent de soie, ce qui trahit leur présence.

La première génération d'adulte est présente de la mi ou fin-juin au début de juillet. Les femelles prolifiques pondent environ 600 oeufs qu'elles déposent en groupe de 200 sous les feuilles. Très peu des larves écloses vont effectivement devenir des adultes car elles s'empressent de quitter le "nid" sans nécessairement trouver de nourriture.

La deuxième génération de larves (première née dans la saison) se nourrit essentiellement de feuillage mais peut endommager les fruits en juillet. Cette génération devient adulte vers le début d'août et engendre une troisième génération de larves qui trouve à peine le temps de se nourrir avant de chercher un site pour hiverner. On considère donc qu'il y a deux générations pouvant occasionner des dommages chaque année.

Dommages

Types de dommages

Les dommages sont de deux types:

1. Dommages aux bourgeons et au feuillage en développement: les feuilles deviennent brunes et squelettiques; Les bourgeons sont attaqués.

2. Dommages aux fruits: zones profondes liégeuses et déformées.

La tordeuse préfère en général le feuillage aux fruits, mais attaque les fleurs avant les feuilles. Les fleurs endommagées au stade bouton rose et à pleine floraison ne donnent généralement pas de fruits. Les plus grands dommages sont fait après le stade calice sur les jeunes fruits (Olson et al., 1978). Plus le fruit endommagé est gros, plus il a de chance de se développer et de rester sur l'arbre. Dans la plupart des cas, les dommages aux fruits n'occasionnent pas la chute des fruits en juin mais sont apparents à leur surface.

Intensité des dommages

Les dommages sont plus considérables où la croissance des arbres est vigoureuse, à tel point que la disponibilité de pousses neuves est le principal facteur déterminant la grosseur de la deuxième génération. En conséquence, la première génération est en général plus importante que la deuxième (Chapman et al., 1968).

La troisième génération est peu capricieuse sur le choix de sa nourriture.

Depuis les années 70, il y a eu de plus en plus de dommages aux fruits en même temps qu'un accroissement général des populations dans le nord-est de l'Amérique du Nord.

Les populations de tordeuse à bandes obliques varient beaucoup d'année en année. En Colombie-Britannique, il s'est écoulé plus de 50 années entre deux cycles de dommages intensifs dus à la tordeuse à bandes obliques (Vakenti et al., 1988).

Selon une étude réalisée en Nouvelle-Écosse(1) à la fin des années soixante (MacLellan, 1977), la tordeuse à bandes obliques occasionne plus de dommages dans les vergers non-traités qu'en verger sous contrôle intégré. Cela n'est pas toujours le cas. Au Québec, Vincent et Roy (1991) n'ont rapporté aucun dommage pour la saison 1990 dans un verger non-traité alors que les producteurs de la région de Deux-Montagnes qui ont appliqué des traitements spécifiquement contre la tordeuse ont subi de 10 à 15% de dommages à la récolte.

Au Québec, la tordeuse à bandes obliques est quand même devenue un ravageur plus important depuis quelques années sans doute en raison des approches de lutte intégrée qui ont amené une réduction de l'usage des insecticides.

Dans son petit verger du Massachusetts, Prokopy (1985) évalue que la tordeuse à bandes obliques et la noctuelle des fruits verts sont responsables de 26% des dommages aux fruits dans un verger non-traité.

Les niveaux de population de la tordeuse à bandes obliques ne sont pas à séparer des populations des autres tordeuses s'attaquant au pommier comme la tordeuse à bandes rouges. On réfère d'ailleurs souvent aux tordeuses comme un groupe ou un complexe de ravageurs.

MOYENS DE LUTTE

Piégeage et dépistage

Piégeage

Aucun piège commercial ne donne de résultats constants avec la tordeuse à bandes obliques (Vincent et al., 1990). Les pièges collants Phérocon 1C et II qui servent à déterminer les périodes de vol des adultes et ainsi prédire les périodes de pointes des dommages larvaires sont cependant à préférer aux pièges Multi-Pher non-collants.

Les pièges sont placés au centre des blocs dans le verger au débourrement, au moins une semaine avant que les adultes ne commencent à voler. Sur l'arbre, on place le piège à hauteur de tête vers l'extérieur de l'arbre et de façon à ce qu'il ne soit pas obstrué par le feuillage ou les fruits. On utilise au moins deux pièges dans le verger et pas plus de 4 ou 5 pièges pour un verger de plus de 25 hectares. Il faut remplacer les capsules de phéromones tous les quatre à six semaines jusqu'en août. Les adultes piégés sont comptés et enlevés.

Les pièges olfactifs servant pour le carpocapse étaient utilisés pour la tordeuse avant l'avénement des phéromones synthétiques. L'appât consistait en un mélange de 2 kg de sucre brun, 10 ml d'huile de sassafras et assez d'eau pour faire 23 litres d'appât. Le mélange était placé au centre de l'arbre dans des pots de verre de 1 litre tout en y ajoutant un peu de levure pour la fermentation. Remplacer tous les 20 jours.

Observations

Elles se font à deux moments, soit à chaque génération de larves. Pour les dommages printanniers, en Nouvelle-Angleterre, Polk (1990) suggère de chercher la présence de larves sur 10 grappes de bourgeons par arbre au moment de la floraison. Chaque partie de l'arbre doit être examinée et on inspecte un maximum de 100 grappes dans le verger. Un niveau d'infestation de 3% justifie une intervention.

Une autre méthode est citée par Langlais (1991). Elle consiste à diviser le verger en cinq blocs uniformes, d'y visiter deux arbres par bloc et d'observer 30 bourgeons fruitiers par arbre, soit 300 bourgeons au total. Le nombre de larves prélevées par échantillonage sert de base aux recommandations de traitements.

Pour les dommages d'été de la deuxième génération, les dépisteurs du Massachusetts commencent leurs observations quand 600 degrés-jours au-dessus de 43F se sont accumulés après la première capture d'adultes qui a généalement lieu vers le début de juillet. Ils recherchent les signes de dommages larvaires en observant 10 fruits et feuilles par arbre réparties dans toutes les parties de l'arbre à raison d'un arbre par 1.2 à 2 hectares. Les résultats sont exprimés en pourcentage de fruits infestés.

Les seuils de tolérance acceptable sont de 3% pour les fruits destinés à la consommation et 10% pour les fruits destinés à la transformation (Polk, 1990).

Moyens de lutte culturaux

Hygiène du verger

L'élimination des arbres abandonnés dans les environs du vergers aide en général au contrôle des différentes espèces de tordeuses et d'une foule d'autres ravageurs des pommiers.

Susceptibilité des cultivars

Les cultivars hâtifs seraient plus susceptibles (Langlais, 1991).

Moyens de lutte biologiques

Bt

Comme il s'agit d'une chenille, l'insecticide biologique Bt est tout indiqué. Hardman et Gaul (1990) ont obtenu une réduction significative des dommages occasionnés par plusieurs ravageurs du pommier, dont la tordeuse à bandes obliques, par l'application en pré-floraison d'un mélange de Bt et de pyréthroides. Le Bt seul à raison de 33 g/hl a permis une réduction de 92% des dommages.

Si la première génération n'est pas contrôlée, les chances de dommages ultérieurs par les larves des autres générations sont accrues. On traite idéalement à l'éclosion des oeufs ou quand les larves sont toutes jeunes.

On peut traiter le feuillage et les fruits au Bt contre les larves des deux générations de 12 à 14 jours après le pic de capture des adultes, soit environ au stade calice pour la première génération et au courant du mois de juillet pour la deuxième génération. Pour le premier traitement, Vincent et al. (1986) conseille le stade bouton rose.

Pour la deuxième génération, un seul traitement appliqué au bon moment va très bien contrôler la tordeuse. Le moment le plus approprié serait lorsque 400 degrés-jours au-dessus de 6C se sont accumulés après le début du vol des mâles (Onstad et al., 1985).

Prédateurs et parasites

Parmis les prédateurs et parasites disponibles commercialement qui s'attaquent à la tordeuse à bandes obliques, on compte entre autres les trichogrammes comme Trichogramma closterae, T. dendrolimi, T. chilonis et T. evanescens qui s'attaquent aux oeufs. Le parasitisme des trichogrammes est grandement affecté par les applications de pesticides.

Les parasites que l'on retrouve naturellement dans nos régions incluent l'ichneumonide Apophua simplicipes et le braconide Macrocentrus iridescens (Barron et Bisdee, 1984) ainsi que l'hyménoptère Meteorus trachynotus qui complète son cycle en parasitant également la tordeuse des bourgeons de l'épinette de façon importante (Maltais et al., 1989).

Autres moyens de lutte

Insecticides végétaux

On peut également contrôler les différentes espèces de tordeuses avec deux applications de pyrèthre et/ou roténone très rapprochées (idéalement 30 minutes entre les deux applications). La première application fait sortir la chenille de sa cachette et la seconde la tue (Ball, 19).

Kovach et al. (1990) ont conclu de leurs expériences que le meilleur choix tant au point de vue de l'efficacité que du coût était le Dipel (Bt) de préférence au mélange pyrèthre-roténone dans le cas où un traitement est nécessaire.

Confusion des mâles

Comme pour dans le cas du carpocapse, la technique de la confusion sexuelle des mâles par inondation du verger avec des phéromones a été envisagée. Reissig et al. (1978) ont obtenu une bonne interférence du comportement des mâles avec la partie Z11-14OH de la phéromone de la tordeuse. La technique n'est pas encore commercialisée.

Les phéromones spécifiques à la tordeuse attirent aussi la tordeuse européenne. La recherche se poursuit pour trouver des phéromones plus spécifiques. Le problème est que les populations ne réagissent pas toutes de la même façon d'un endroit à l'autre.

Bibliographie

Ball, J. et L. Ball. 1989. Rodale's landscape problem solver. Rodale Press, Emmaus, Pennsylvanie.439 pages.

Barron, J.R. et H.E. Bisdee. 1984. Hymenopterous parasites with lepidopterous and sawfly hosts on Lonicera (honeysuckle) in the Ottawa area. Canadian Entomologist, 116:1345-1356.

Carr, A. 1979. Rodale's color handbook of garden insects. Rodale Press, Emmaus, Pennsylvanie.

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MacLellan, C.R. 1977. Populations of some major pests and their natural enemies on young and semidwarf apple trees in Nova Scotia. Canandian Entomologist, 109:797-806.

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MISE-EN-GARDE

Ce document a pour but de faire la synthèse de l'information scientifique et populaire disponible sur le sujet traité, dans une perspective d'agriculture biologique. Il ne s'agit donc pas de recommandations ou d'un guide de production.

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1. Province où il n'y a qu'une génération de tordeuse à bandes obliques.

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