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Agro-Bio-330-15

L'ANTHONOME DE LA FLEUR DU FRAISIER

Jean Duval, agr., M.Sc.

 

Table des matières

Caractéristiques générales

Dépistage

Moyens de lutte

Bibliographie

L'anthonome de la fleur du fraisier (nom scientifique- Anthonomus signatus - nom commun anglais: strawberry clipper weevil) est un petit coléoptère de la famille des charançons particulier à l'Est de l'Amérique du Nord. L'anthonome est souvent étudié en même temps qu'un autre insecte qui s'attaque aux fleurs du fraisiers, soit la punaise terne.

CARACTÉRISTIQUES GÉNÉRALES

Espèces attaquées

L'anthonome attaque plusieurs espèces de petits fruits: fraisiers, framboisiers, muriers sauvages, bleuétiers, vignes. Les dommages qu'ils provoquent sont d'une importance économique surtout dans la culture du fraisier cependant.

Comme c'est la cas pour beaucoup & insectes indigènes à l'Amérique du Nord, l'anthonome s'est adapté graduellement aux nouvelles conditions offertes par l'agriculture. Il serait devenu un ravageur important du fraisier suite au développement de variétés de fraises qui produisent beaucoup de pollen et de gros fruits, ce qui permet une meilleure survit des larves. Au 19e siècle, il semble que l'anthonome préférait les ronces (ex.: mûres) aux fraisiers.

Dommages

Les dommages causées par l'anthonome sont de deux natures. Premièrement, après la ponte, les femelles coupent le pédoncule des bourgeons floraux, ce qui provoque leur déssèchement et leur chute (figure 1). Les fleurs en moins sont des fraises en moins. Au Québec, ces pertes de bourgeons floraux varient de 9 à 46% selon Paradis et Simard (1979).

 

Figure 1 - Dommages aux bourgeons floraux causés par l'anthonome (Source: Lachance et al., 1987)

Deuxièmement les adultes se nourrissent aussi des pétales et du pollen des fleurs du fraisier. Les cultivars qui produisent plus de pollen seraient plus affectés par ce deuxième type de dommages. Des petits trous ronds dans les pétales trahissent la présence de l'anthonome (figure 2).

 

Figure 2 - Dommages aux fleurs causés par l'anthonome (Source: Lachance et al., 1987)

La perte économique dûe à l'anthonome a longtemps été considérée comme importante. En effet, la perte peut souvent impliquée la plus belle. qualité de fraises, les premières fleurs donnant souvent les plus grosses fraises et surtout les plus payantes de la saison. Toutefois, quelques études ont récemment démontré que les pertes économiques réellement dues à l'anthonome seraient surestimées dans la plupart des cas parce qu'il n'y a pas de correlation directe entre la perte de bourgeons et la perte de rendements. Pour bien comprendre cette relation, il est important de connaître la hampe florale du fraisier (figure 3).

 

Figure 3 - Hampe florale du fraisier (Source: Charbonneau, 1995)

Des chercheurs québécois (Khanizadeh et al., 1992) ont démontré que la perte des bourgeons primaires ne résultait pas en des pertes de rendements significatives sur les cultivars Kent et Glooscap. Seule la perte du bourgeons primaires et secondaires engendrait des pertes de rendements de 36 à 43%. Les fraisiers ont donc une certaine capacité à compenser pour la porte des bourgeons primaires.

Les données recueillies dans les réseaux de dépistage de l'état de New York pendant plusieurs années nont pas non plus permis d'établir de correlation entre le nombre de bourgeons coupés par l'anthonome et les rendements en fraises parce que plusieurs des variétés cultivées dans l'Est de l'Amérique du Nord ont une forte capacité à compenser pour la perte de fleurs. Plus les dommages de l'anthonome se font tôt en saison, plus certains fraisiers peuvent compenser en produisant de nouvelles fleurs et de plus gros fruits sur les bourgeons secondaires et tertiaires, ce qui résulte en des rendements semblables (voir la section Variétés résistantes).

Pritts et English-Loëb (1998) ont conclu de leurs recherches que dans la plupart des circonstances et pour la plupart des variétés, les dommages de l'anthonome peuvent être ignorés!

Description

Adulte

L'anthonome est un coléoptère de type charançon, c'est-à-dire qu'il a un corps dur, bombé et un long bec. L'adulte est noir et mesure environ 3 mm de longueur (figure 4).

Larve

La larve est de même longueur que l'adulte. Elle est d'un blanc crème. On compte trois stades larvaires qui se déroulent tous dans le bouton floral coupé.

 

Tableau 1 - Dimensions des différents stades de l'anthonome

Stade

Longueur (mm)

Largeur (mm)

Oeuf

0,5

0,4

Larve - ler stade

0,3

0,3

Larve - 2e stade

0,4

0,4

Larve - 3e stade

0,6

0,5

Pupe

2,6

1,5

Adulte

2,5

1,3

Adapté de Mailloux et Bostanian (1993)

 

Figure 4 - Stade adulte de l'anthonome du fraisier

 

Cycle de vie et comportement

L'anthonome a une seule génération par année au Québec. Cela prend environ 63 jours dans le sud du Québec pour aller du stade de l'oeuf à celui d'adulte (Mailloux et Bostanian, 1993).

Hibernation et émergence

L'adulte hiverne surtout dans les débris végétaux que l'on trouve dans la fraisière. S'il y a un boisé Près du champ de fraise, le boisé peut aussi servir à l'hibernation. Tôt au printemps, les adultes apparaissent au stade bouton vert du fraisier. L'apparition de l'anthonome n'est pas graduelle mais très soudaine. Les périodes d'apparition vont de la mimai à la fin juin, avec la plus grande intensité à la fin mai (Rivard et al., 1979). Dans le Sud du Québec, Mailloux et Bostanian (1993) ont calculé le nombre de degrés-jours au-dessus de 0°C pour l'apparition des adultes entre 1983 et 1987 aux stations de recherche de Frelighsburgh et de lAssomption. Les premiers adultes apparaissaient entre 175 et 400 degrés-jours selon le site et les années. 100% des adultes étaient apparus entre 550 et 850 degrés-jours. La majorité des adultes apparaissaient entre 250 et 500 degrés-jours. Cette variabilité et le fait que l'augmentation de la population émergée se fait très rapidement complique le dépistage et la lutte contre l'anthonome au printemps, laissant peu de temps pour agir.

Ponte

Les adultes se nourrissent du pollen des fleurs. Après l'accouplement, la femelle pond un oeuf parfois deux, par tige florale. Elle coupe ensuite le pédoncule, ce qui provoque le déssèchement et la chute du bourgeon floral. La ponte commence vers le 14 mai dans le Sud du Québec et peut se poursuivre jusqu'au 12 juin en moyenne. Les anthonomes quittent les champs de fraises pour les framboiseraies quand les fleurs de Framboisiers apparaissent.

Développement larvaire

La larve se développe ensuite dans les bourgeons tombés au sol. Le stade de pupe est aussi complété dans le bourgeon.

Nouveaux adultes

De nouveaux adultes émergent surtout au début de juillet mais causent en général peu de dommages à ce moment. Cette nouvelle génération d'adultes ne se reproduit pas, bien qu'il y ait suffisamment de temps jusqu'à la fin de la saison pour engendrer une deuxième génération d'anthonome. On peut les trouver actifs jusqu'au premières gelées sérieuses mais la plupart d'entre eux vont en diapause dès le mois daoût.

DÉPISTAGE

Il existe deux méthodes de dépistage pour l'anthonome. L'une, celle du quadrat, consiste à compter le nombre de boutons floraux coupés dans une superficie donnée. L'autre, celle de la frappe, consiste à compter le nombre d'adultes capturés en frappant les plants de fraises au-dessus d'un contenant. Le décompte se fait à répétition au hasard sur l'ensemble du champ pour l'une et l'autre méthode, et une moyenne est établie.

Méthode du quadrat

En Ontario et dans l'état de New York, un carré vide de 30 x 60 cm (2 pieds carrés) appelé quadrat est couramment utilisé. Le nombre de boutons floraux coupés dans le quadrat est compté. On ne compte pas les boutons qui sont seulement perforés. Cette méthode permet d'exprimer les résultats sur une base de superficie. Comme les rangs ont souvent environ 30 cm de largeur, les résultats peuvent aussi être exprimés par longueur de rangs de fraisiers. Le seuil d'intervention employé dans l'état de New York est de 1,3 boutons floraux coupés par 2 pieds linéaire de rang.

Méthode de la frappe

Il est aussi possible d'effectuer le dépistage en dénombrant les adultes tombés dans un pot suite à la frappe d'une hampe florale. Un seuil de 6 adultes par 100 frappes a été suggéré au Québec par Lachance et al. (1985). Un aspirateur de type D-Vac peut aussi être utilisé pour le décompte des adultes.

Charbonneau (1995) a conclu de son expérience comparative sur les méthodes de dépistage que la méthode de la frappe était moins sensible que celle du quadrat, donc moins fiable pour ce qui est de l'identification des zones à risques telles que les bordures quand le champ est situé près d'un boisé. De plus, la méthode du quadrat est plus facilement applicable sur une grande superficie que celle de la frappe.

Les seuils d'intervention seront sans doute revisés à la baisse prochainement vu la constatation de l'absence de lien entre le nombre de bourgeons floraux coupés et les rendements. Des seuils spécifiques à chaque cultivars devraient être développés.

Effet bordure

Lorsqu'un boisé est situé près d'un champ de fraise, les anthonomes vont souvent y hiberner. Au printemps, lors de l'émergence, les bordures du champ situées près du boisé seront affectées les premières par l'anthonome. Le dépistage des bordures sera alors particulièrement critique, comme l'a démontré l'expérience de Charbonneau (1995) faite dans le Sud du Québec.

Piégeage

Selon la littérature examinée, aucun piège efficace n'existe pour capturer le stade adulte de l'anthonome. Mailloux et Bostanian (1993) ont utilisé un piège vertical englué pour capturer les adultes en vol, mais ne rapportent pas de captures.

MOYENS DE LUTTE

Moyens de lutte culturaux

Choix du site

L'éloignement des boisés lors de la sélection d'un site pour une fraisière est une tactique qui s'avère efficace lorsqu'elle est possible.

Rotation et durée de vie de la fraisière

Comme l'anthonome est un insecte qui se déplace peu, la rotation est une bonne mesure de prévention. Les dommages sont souvent moins importants en première année de production qu'en deuxième année. Plus on garde longtemps la fraisière, plus les populations d'anthonomes augmentent plus il y a risque de pertes économiques. On fera bien d'espacer d'au moins deux années le retour d'une fraisière sur un même site.

Variétés résistantes

Il n'existe pas à proprement parler de variétés résistantes. Certaines variétés peuvent cependant compenser la perte de bourgeons floraux par la production de plus gros fruits sur les fleurs secondaires et tertiaires ou par la production d'autres fleurs. Certains cultivars ont une floraison si abondante qu'ils sont moins affectés.

Pritts et English-Loeb (1998) considèrent que les variétés Kent Jewel peuvent facilement compenser les pertes des premiers bourgeons floraux, d'autant plus si les dommmages de l'anthonome se fait tôt en saison. Le cultivar Jewel peut compenser une perte aussi grande que 80 bourgeons par mètre sans que les rendements en soient affectés. lx tableau qui suit présente les index de compensation établis par Pritts et English-Loeb pour 12 cultivars. Plus l'index est élevé, plus le cultivar a une grande capacité de compensation. Il faut toutefois noté que si un gel tardif survient, même les cultivars à forte compensation ne pourront compenser adéquatement.

 

Tableau 1 - Index de compensation des variétés de fraisiers de l'Est américain

Variété

 Index

Seneca  44
Mohawk  25
Mira 25
Jewel  20
Lateglow 14
Primetime  12
Idea  12
Earliglow  9
Delmarvel 8
Cavendish  8
Honeoye 5

Northeaster

0

 

Les cultivars, quils soient hâtifs ou tardifs, peuvent échapper aux dommages de l'anthonome selon le moment d'émergence de l'insecte. Comme ce moment n'est pas prévisible avec précision, il est difficile de compter sur le choix de cultivars selon leur vitesse de maturité pour contrôler l'anthonome.

Les variétés de fraisiers à pistilles sont peu attaquées par l'anthonome car elles ne semblent pas fournir les éléments nécessaires au bon développement de l'insecte.

Compagnonnage

Pas de compagnonnage connu. Une technique qui consiste à planter un rang de fraisiers à stamines pour cinq rangs de variétes à pistilles a déjà été recommandé aux USA parce qu'elle donnait de bons résultats.

Moyens de lutte physiques

Bâches

Les bâches flottantes synthétiques utilisées dans les fraisières produisent une récolte plus hâtive et plus abondante. Dans plusieurs cultures, les bâches permettent de bien contrôler les insectes nuisibles en servant de barrière physique. L'effet de leur utilisation sur l'anthonome est variable mais généralement favorable à l'insecte d'après les recherches réalisées dans l'état du Maine par McCue et de ses collègues (1993). En effet, lorsque les bâches sont installées en septembre, il semble qu'elles favorisent l'hibernation et l'émergence de l'insecte. En première année de production, le nombre de bourgeons floraux coupés par l'anthonome était inférieur sans bâches qu'avec bâches. En deuxième année, la tendance était la même bien qu'il n'y avait pas de différence significative. Les bûches avaient toutefois un effet marqué (à la baisse) sur les populations de punaises ternes.

Aspirateur 

Un aspirateur peut être utilisé pour rammasser les adultes de l'anthonome.

Moyens de lutte biologique

L'anthonome compte plusieurs ennemis naturels. Cependant, le parasitisme diminuent les populations seulement après que les dommages aient eu lieu, ce qui limite beaucoup les perspectives de lutte biologique.

Autres moyens de lutte

Insecticides végétaux

L'emploi de roténone à deux reprises soit à l'apparition des boutons et juste avant la floraison peut aider à contrôler l'anthonome. La pratique conventionnelle veut qu'un traitement insecticide soit effectué dès les premières grosses chaleurs dans les champs ou l'on sait qu'il y a un problème historique avec l'anthonome, même sans dépistage. Des traitements en bordure lorsqu'il y a présence d'un boisé vont permettre un meilleur contrôle.

Selon Mailloux et Bostanian (1993), c'est lorsque la population d'adultes est au maximum et avant qu'elle n'entre en diapause qu'il faut la contrôler, soit en juillet. Bien sûr, l'effet ne se fera sentir que l'année suivante. Un producteur biologique qui voudrait garder sa fraisière pour une deuxième année de production pourrait donc traiter à la roténone après la récolte. Notons que c'est aussi à ce moment que le parasitisme est le plus intense et que la roténone pourrait l'affecter.

 

BIBLIOGRAPHIE

Charbonneau, F. 1995. Cartographie à des adultes de l'anthonome de la fleur du fraisier et ses dégâts dans une fraisière de deux ans. Rapport final, projet 24-815267-06016, Le Plan vert du Canada.

Khanidazeh, S., M. Lareau, M. Lamarre et D. Buszard. 1992. Simulating the effect of spring frost and clipper weevil on yield of strawberry. Journal of Small Fruit and Viticulture, 1 (1): 25-31.

Lachance, P., J. Fortin et G. Gilbert. 1985. Services de dépistage écologigue en Mauricie. Pages 153 A 168 In Symposium sur la culture de la fraise. Conseil des productions végétales du Québec, Agdex 230/20.

Mailloux, G. et NJ. Bostanian. 1993. Development of the strawberry bud weevil (Coleoptera: Curculionidae) in strawberry fields. Annals of the Entomological Society of America, 86(3):384-393.

McCue, JJ., D.T. Handley et J.E. Pollard. 1993. Effect of rowcovers and insecticide sprays on insect damage to strawberries. Acta Horticulturae, n°348:500-503.

Pritts, MY et G. English-Loeb. 1998. Cultivar tolerance to strawberry clipper damage. pages 83 et 84 In 1997 New York State Fruit Project Reports Relating to IPM. Cornell University Cooperative Extension, NYS IPM Publication #214.

Pritts, M.P. et G. English-Loeb. 1997. Is strawberry clipper (Anthonomus signatus) an economically important pest? HortScience, 32(3):505.

Vincent, C., D.D. de Oliveira, A. Bélanger. 1990. The management of insect pollinators and pests in Quebec strawberry plantations. Pages 177-192 In Bostanian, N.J., L.T. Wilson et T.J. Dennehy (eds.). Monitoring and integrated management of arthropod pests of small fruit crops. Intercept, Andover, UK 301 pages.

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