EAP Publications | Virtual Library | Magazine Rack | Search | What's new
Ecological Solutions Roundtable
AGRO-BIO - 360 - 03
Les thrips sont des insectes qui vivent en groupes, comme l'indique leur nom toujours au pluriel. Les dommages qu'ils causent aux productions légumières et ornementales en serre sont surtout d'ordre cosmétique mais ces dommages affaiblissent aussi les plants. Leur présence est généralisée dans les serres au Canada et il n'est pas rare de rencontrer des races résistantes aux insecticides chimiques. Le but de ce document est de présenter l'insecte et les moyens de lutte écologique pour y faire face.
Les thrips sont des insectes allongés et minuscules avec des ailes qui ressemblent à des plumes. Les femelles sont parthénogéniques, ce qui veut dire que les thrips peuvent se reproduire sans les mâles, du moins pendant quelques temps. Les nymphes ressemblent aux adultes sauf qu'elles n'ont pas d'ailes et sont plus pâles. L'identification des différentes espèces de thrips est difficile étant donné que ces insectes sont très petits.
La principale espèce qui cause des dommages en serre au Québec est le thrips des petits fruits (Frankliniella occidentalis - Western flower thrips). Cette espèce, dont les adultes mesurent environ 0,75 mm de long, est jaunâtre et son stade de pupe se fait dans le sol.
Le cycle de vie du thrips des petits fruits se déroule comme suit. Les femelles déposent leurs oeufs sous la surface de la feuille. Les oeufs éclosent au bout de quatre jours et les jeunes nymphes se nourrissent pendant trois jours avant de passer au deuxième stade nymphal. A ce stade, elles se nourrissent pendant encore trois jours et tombent ensuite au sol où elles se réfugient pour ressortir sous forme adulte deux jours plus tard. L'adulte est très actif. Les femelles se nourrissent pendant six jours avant de commencer à pondre et leur vie durent environ 40 jours durant lesquels elles vont pondre de 50 à 100 oeufs.
D'autres espèces de thrips qui peuvent être nuisibles en serre sont le thrips des serres (Heliothrips haemorrhoidalis) et le thrips de l'oignon (Thrips tabaci). Le premier, plus gros que les autres espèces, se déplace lentement et est de couleur brun foncé avec des pattes jaunes. Il passe tous les stades de sa vie sur les feuilles. La larve est d'un blanc vitreux avec des yeux rouges. Le thrips de l'oignon est de couleur variable allant de jaune pâle à brun-foncé et la larve de blanc à jaune pâle. Cette dernière espèce attaque un très grand nombre d'espèces végétales.
Il existe aussi des thrips bénéfiques qui s'attaquent aux acariens et aux autres thrips. On les reconnaît par des bandes et des roussissures sur les ailes.
Les nymphes et les adultes des thrips endommagent les plantes en frottant et en égratignant les tissus végétaux ce qui laisse sortir la sève qu'ils suçent par la suite. Ceci a pour effet de provoquer l'apparition de taches pâles et argentées et la déformation des points de croissance.
Les thrips font de grands dommages dans la culture du piment doux où ils s'attaquent au calice, ce qui provoque la déformation des fruits et laissent des marques sur les fruits. Dans la culture du concombre, les thrips occasionnent la courbure des fruits et des pertes de rendements. Les thrips peuvent transmettre le virus de la tache bronzée de la tomate, une maladie qui attaque un grand nombre de plantes.
Sur les plantes ornementales, les thrips préfèrent avant tout les fleurs blanches. Les bourgeons de fleurs endommagés peuvent devenir bruns et présenter des pétales déformés à l'éclosion. Les feuilles sont également endommagées.
Les thrips volent peu et surtout quand ils sont dérangés et se laissent transporter le plus souvent par le vent ou la ventilation dans une serre. En l'absence de vent, ils se déplacent à une vitesse de 10 à 50 centimètres à la seconde selon les espèces. Les thrips adultes restent au sol lorsqu'il fait froid et ne volent pas si les températures sont inférieures à 4-6C.
Le dépistage est très important pour les thrips car ils se reproduisent très rapidement et sont difficiles à contrôler. Parce qu'ils sont très petits et plutôt discrets, les thrips peuvent être très nombreux avant qu'on ne détecte leur présence. Des petites marques argentées sur les feuilles et les fleurs ainsi que des petits dépôts noirs (excréments) sont des signes que des thrips sont présents. Souvent, les dommages sont plus importants en été alors que les populations s'accroissent sans qu'on s'en rende compte.
Les thrips adultes se retrouvent souvent sous le feuillage. L'adulte du thrips des petits fruits se cache aussi dans la fleur où il est facile à voir. Lorsqu'on suspecte leur présence, un moyen simple de détecter les thrips est de secouer vigoureusement une fleur dans la paume de la main et d'examiner à la loupe.
Pour un dépistage plus sérieux, on utilise des pièges collants bleus ou jaunes (les bleus sont plus efficaces) à raison de 1 par 50 plantes placés au-dessus de la plante. Il existe des pièges en cartons (plus faciles à utiliser) ou en ruban (moins chers à l'achat). Lorsque les plants sont trop hauts, on place les pièges dans l'allée pour qu'ils soient bien visibles aux thrips.
Des mesures d'hygiènes strictes entre les récoltes aident au contrôle des thrips. Les thrips peuvent attaquer un grand nombre de plantes dont plusieurs mauvaises herbes. Le contrôle serré des mauvaises herbes est donc important, particulièrement entre les récoltes ou pendant l'hivernement. Lorsque leurs nombre est restreint, les bourgeons et fleurs infestés de thrips doivent être enlevés aussitôt que les insectes sont détectés pour éviter la propagation.
Les plantes qui manquent d'eau sont particulièrement susceptibles aux thrips. Il faut donc veiller à arroser suffisamment ou brumiser fréquemment.
La rotation avec des plantes non susceptibles aux thrips permet de briser leur cycle (ex.: lin, trèfle, avoine). Les sols très riches en matière organique semblent favoriser les thrips dont le stade de pupe se passe au sol.
Il n'en existe aucune officiellement mais la variété de tomate Kyndia, qui résiste à bien d'autres ravageurs, serait moins susceptible aux thrips que les autres variétés.
Comme pour dans le cas des pucerons, les mulchs d'aluminium empêchent les thrips d'attaquer les plantes qui ne poussent pas trop en hauteur. Pour les rosiers, on peut par exemple fabriquer une plaque recouverte d'aluminium qui va couvrir la base du plant et la dépasser de 30 à 60 cm. Les thrips perdent le sens du haut et du bas à cause des reflets.
Un jet d'eau va assomer les thrips et les faire tomber des plants. Le même jet d'eau additionné de savon va les étouffer.
Au printemps et en été, les thrips envahissent les serres en provenance de l'extérieur par les fentes et la ventilation. Comme l'insecte est minuscule, il est à peu près impossible de l'empêcher d'entrer avec les moustiquaires habituels. Il existe sur le commerce des moustiquaires très fins qui empêche les thrips de passer (voir adresses utiles à la fin).
Un agent de contrôle biologique très utilisé contre le thrips des petits fruits est Amblyseius cucumeris, un acarien prédateur qui peut maintenir les populations de façon à ce que les dommages soient faibles. Amblyseius est de couleur rose pâle et dépose ses oeufs sous les feuilles le long des nervures. Un proche parent, Amblyseius mckenziei (=barkeri), est aussi utilisé contre le thrips de l'oignon et le thrips des petits fruits.
Les Amblyseius ne s'attaque qu'au nymphes (les adultes sont trop gros) et même souvent qu'au premier stade nymphal. En conséquence, le contrôle n'est pas immédiat et prend plusieurs mois à s'effectuer. Un autre inconvénient d'Amblyseius est qu'il entre en diapause à l'automne. Ce prédateur ne pond pas pendant les jours courts d'octobre à février. Des températures supérieures à 21C la nuit et l'éclairage artificiel peuvent induire la ponte pendant cette période. Il est toutefois péférable de ne l'employer que de février à septembre. La température idéale pour Amblyseius est entre 20 et 25C et le taux d'humidité de 70%.
Pour un contrôle efficace, il faut introduire les acariens prédateurs tôt afin que la population soit assez grande lorsque les thrips pullulent. Cela veut dire de les introduire soit quand les plants sont petits, quand moins de 25% des feuilles sont infestées de nymphes ou quand moins de 10% des feuilles sont infestées d'adultes. Amblyseius va survivre même avec des populations de thrips très basses. Malgré tout, les thrips vont souvent entrer de l'extérieur de la serre au printemps et la population de prédateurs n'est pas suffisante pour assurer un contrôle satisfaisant dans ce cas.
Tableau 1 - Densité de l'acarien prédateur Amblyseius cucumeris à introduire pour lutter contre le thrips des petits fruits selon la culture | |||
Culture | Densité de prédateurs /plant /feuille infestée | Fréquence d'appl. | Nombre d'applications |
Tomate Piment Concombre |
30 à 50 5 à 10 50 à 100 |
aux 2 semaines aux 2 semaines aux 1 à 2 semaines |
jusqu'à ratio 1:1 2 à 3 fois jusqu'à ratio 1:1 |
Amblyseius n'est pas très efficace sur le concombre. Il a de la difficulté à se déplacer sur les feuilles pubescentes du concombre. Il est donc important de mettre des prédateurs sur au moins deux feuilles de chaque plant et sur 75 à 100% des feuilles infestées. Sur le concombre, les applications se poursuivent jusqu'à ce que le ratio prédateur/ravageur soit de 1, soit jusqu'à ce qu'il y ait autant de feuilles avec des prédateurs qu'avec des thrips ou même plus si l'infestation est forte.
Les prédateurs sont expédiés dans du son de blé ou de la vermiculite habituellement. Il est bon de mélanger le son avant de le mettre sur les feuilles et de ne pas le laisser en tas sur les feuilles.
En plus d'Amblyseius cucumeris, il est conseillé aux producteurs en serre d'introduire d'autres acariens prédateurs, du genre Hypoaspis. Ces acariens vivent en colonie au sol et vont se nourrir des nymphes de thrips qui tombent des plants pour la pupaison. Les Hypoaspis sont utilisés surtout dans la lutte contre les sciarides, mais il a été démontré qu'ils réduisaient jusqu'à 30% l'émergence des thrips adultes.
Les syrphides, disponibles commercialement, attaquent les thrips comme bien d'autres insectes. Plus spécialisés, les anthocorides (punaises prédatrices) sont maintenant disponibles commercialement spécifiquement pour la lutte aux thrips en serre. Ainsi, la punaise pirate (Orius tristicolor - Minute pirate bug) attaque tous les stades des thrips et est utilisé depuis 1992 dans les serres québécoises avec plus de succès qu'Amblyseius. On retrouve naturellement cette punaise sur la luzerne et la verge-d'or entre autres.
Pour les plantes ornementales, les purins et poudrages à base de tabac sont efficaces (non-homologués en production biologique). Les poudrages de souffre et de tabac combinés ont été la mesure par excellence contre les thrips pendant de nombreuses années dans les serres.
Dans des serres hollandaises, on a utilisé avec succès l'ail contre les thrips. Il s'agit de placer un plant d'ail par 25 mètres carrés (270 pieds carrés) de banc de culture. L'ail peut aussi être utilisé en purin.
La roténone ou le pyrèthre sont les recours d'urgence quand rien d'autres ne fonctionne.
PURIN D'AIL ET DE PIMENT ROUGEMélanger ces ingrédients et laisser reposer 1 heure. Filtrer le mélange et laisser couler dans un pulvérisateur. Appliquer . |
La terre diatomée est efficace lorsque appliquée au sol autour des plants pour contrôler les nymphes et les pupes et sur les fleurs ou sous les feuilles. Le savon insecticide est surtout approprié dans le cas des thrips de serre qui passe toute leur vie sur les plantes.
Anonyme. 1992. Garlic vs. thrips in greenhouses. Hortideas, 9(9):102.
B.C. Ministry of agriculture and fisheries. 1987. Greenhouse vegetable production guide 1987.
Carrier, A. 1989. Production et lutte biologique en serre. Ministère de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation du Québec.
Carrier, A., S. Johnson et F. De Passillé. 1990. Légumes de serre: guide sur l'utilisation de la lutte biologique aux insectes et acariens 1990. Conseil des productions végétales du Québec, Comité des cultures abritées.
Elliott, D.P. et L.A. Gilkeson. 1991. Biological control of pests in greenhouse systems. Applied bionomics, Sydney, Colombie-Brittanique.
Gilkeson, L.A., D.P. Elliott et S.B. Hill. 1992. La lutte biologique contre les arthropodes ravageurs des légumes de serre. pages 195-204 in Vincent, C. et D. Coderre. 1992. La lutte biologique. Gaëtan Morin Éditeur, Boucherville.
Yepsen, R.B. 1984. The encyclopedia of natural insect and disease control. Rodale Press, Emmaus, Pennsylvanie.
© 1993 Projet pour une agriculture écologique. Tous droits réservés.
Info Request | Services | Become EAP Member | Site Map
Give us your comments about the EAP site
Ecological Agriculture Projects, McGill University (Macdonald
Campus)
Ste-Anne-de-Bellevue, QC, H9X 3V9 Canada
Telephone:
(514)-398-7771
Fax:
(514)-398-7621
Email: info@eap.mcgill.ca
To report problems or otherwise comment on the structure of this site, send mail to the Webmaster