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CULTURE DES CÉRÉALES AVEC PEU OU PAS DE BÉTAIL

principes de base en agriculture biologique

Joseph POUSSET

La culture céréalière sans bétail n'est pas forcément anti écologique

La monoculture est habituellement présentée comme anti-écologique par les partisans de l'agriculture biologique; elle l'est effectivement et ne peut d'ailleurs faire pratiquée qu'en culture classique avec l'appoint d'engrais solubles et de produits de traitement.

Il ne faut cependant pas confondre monoculture (culture d'une seule plante ou de deux; ex.: blé - mais) et polyculture sans ou avec peu de bétail; l'expérience montre que la seconde est possible en agriculture biologique et peut être parfaitement écologique si elle est bien conduite.

Parmi les types de polyculture sans bétail pratiqués, la culture céréalière occupe une place particulièrement importante; pour la réussir il faut respecter les grands principes de l'agriculture écologique et d'autres plus spécifiques de la culture céréalière.

Travailler dans un environnement aussi sain que possible

C'est l'une des conditions les plus impératives d'une agriculture écologique; elle n'est pas toujours respecté dans les grandes régions céréalières où les paysages vent souvent déséquilibrés du fait d'un déboisement excessif pratique il y a déjà plusieurs siècles; clans certains secteurs, la mise en place de bosquets ou de haies est une nécessité en particulier pour permettre un meilleur équilibre entre les parasites des cultures et leurs prédateurs

Cultiver des céréales bien adaptées au milieu

Toutes les céréales ne réussissent pas de la même façon sur tous les sols et sous tous les climats; c'est une évidence qu'il est bon de rappeler car si les moyens de l'agriculture classique l'engrais solubles et produits de traitements très spécifiques en particulier) permettent de cultiver les plantes dans des milieux qui leur conviennent mal, il n'en va pas de même en agriculture écologique; c'est ainsi par exemple qu'il est hasardeux de vouloir cultiver systématiquement du blé d'hiver sur des terres froides et mouillantes au printemps: la céréale risque de mal démarrer et d'être submergée par les adventices avant d'avoir acquis une vigueur suffisante. Ceci se produit souvent sur des sols à vocation herbagère qu'on a voulu transformer en sols à céréales.

De même il est inutile de vouloir cultiver par exemple du sarrasin sur des terres limoneuses profondes et très «poussantes» car il risque de croître exagérément et d'avoir une maturité très irrégulière rendant sa récolte difficile.

Le climat joue également un rôle important: on ne peut cultiver du blé sur certains hauts plateaux du Jura ou du Massif Central car la neige risque d'être là avant qu'il soit arrivé à maturité...

J'arrêté là mes exemples car c'est à chacun de trouver les céréales les mieux adaptées au milieu où il se trouve; précisons quand même qu'il ne faut pas oublier certaines plantes auxquelles on ne pense pas toujours les lentilles, le lin oléogineux, le lin à fibres, le chanvre, le lupin; elles peuvent permettre de varier la rotation de façon intéressante.

Toutes ces considérations techniques doivent bien sûr être confrontées aux contraintes économiques.

Mettre au point une bonne rotation: un aspect fondamental

Lire à ce sujet la fiche: Rotations et assolements en agriculture biologique »; une petite précision supplémentaire toutefois: le semis d'une légumineuse au printemps dans une céréale doit être fait avec prudence, surtout s'il s'agit du trèfle violet qui monte facilement en année chaude et humide; en règle générale ne pas semer un trèfle violet dans une céréale avant que celle-ci mesure 10 à 15 cm; par ailleurs un semis de légumineuse trop précoce est voué à l'échec lors des printemps froids (si fréquents).

Pratiquer un bon travail du sol

La fertilité d'un sol bien travaillé augmente, celle d'un sol mal travaillé diminue. En céréaliculture écologique, les façons superficielles revêtent une importance particulière car elles vent un puissant moyen de lutte contre les adventices si on les pratique correctement; en ce sens elles peuvent pallier en partie l'absence des prairies temporaires (mais en ce sens seulement).

Le déchaumage en particulier est bien connu pour faire lever les graines des plantes qui ont grainé dans la céréale (à ce sujet on peut dire que les moissonneuses batteuses vent de véritables semoirs à adventices; sur les anciennes moissonneuses batteuses existait un sac pour recueillir au moins une partie des graines d'adventices), encore que la levée ne se fait que si l'humidité est suffisante; il faut le pratiquer chaque fois que c'est nécessaire, mais sans excès non plus.

Le travail du sol à pratiquer est en fait étroitement dépendant en premier lieu de la nature de la terre et du type de rotation pratiqué, il pourra, par exemple, être le suivant: (luzerne de 2 ans fauchée): disquage griffage en fin d'été après apport éventuel de fumier et d'engrais minéraux bien choisis, compostage en surface, labour léger, façons superficielles, blé d'hiver, déchaumage /et semis éventuel de moutarde broyée au printemps), plus apport éventuel d'engrais minéraux bien choisis, compostage en surface de la moutarde, labour léger, préparation du sol /semis d'avoine de printemps avec légumineuse associée, etc.

Selon la façon dont cette rotation va continuer le travail du sol va varier, il va varier également selon la nature du sol et le climat qui vont orienter vers les façons d'hiver plutôt que vers celles de printemps ou inversement...

Une bonne fumure

La fumure est importante en culture sans bétail où les exportations d'éléments minéraux en dehors de la ferme vent notables; ceci n'empêche pas qu'avec une rotation très course (1 an de légumineuses mulchées plus 2 ans de céréales) et un sol riche et vivant constituent un bon «garde manger» (cf. La «Conversion à l'agriculture biologique» par J. Pousset, document N. & P.) il soit possible d'obtenir de bons rendements en céréales plusieurs années de suite sans apporter aucune fumure, mémé organique, toutefois il n'est pas encore prouvé que ceci puisse être prolongé très longtemps et de toute façon il serait particulièrement écologique de restituer à la terre les matières organiques qui vent gaspillées dans les villes (boulées ou jetées dans les égouts).

En conséquence il parait judicieux d'apporter les éléments nutritifs qui vont permettre de maintenir le garde-manger plein.

Les céréaliers pouvant se procurer du fumier ont intérêt à en apporter de temps en temps pour maintenir le stock d'humus et l'activité microbienne; la restitution des pailles permet aussi un apport important de matières organiques, tout comme les engrais verts.

Une bonne technique consiste à broyer la paille après la moisson, à semer un engrais vert de saison (colza, moutarde...), à épandre fumier et engrais minéraux que réclame le sol puis à passer un appareil à disques ou à dents.

L'engrais vert germe à la première pluie avec un certain nombre d'adventices et le tout combiné à la paille le et à la fumure constitue un remarquable moyen d'améliorer et de maintenir la fertilité du sol.

L'azote peut être apporté en quasi totalité par les engrais verts et spécialement par les légumineuses; les autres éléments peuvent être fournis sous forme de matières organiques ou avec les engrais minéraux admis en agriculture biologique; on a toujours intérêt à apporter les engrais au moment du semis d'un engrais vert car celui-ci les met sous une forme intéressante pour la culture à venir.

La nature et les doses des engrais à apporter varient selon les situations; dans certains cas et notamment en période de conversion l'analyse de sol peut fournir des indications précises.

La lutte contre les adventices

Avec un sol normalement équilibré, bien travaillé et sur lequel on pratique une bonne rotation, les adventices ne doivent pas poser de gros problèmes et il est parfaitement possible dans certains sols de faire une bonne céréaliculture sans lutter directement contre les adventices.

Toutefois certaines terres se salissent plus facilement que d'autres, de plus un remuage du sol au printemps active la vie microbienne et permet une meilleure libération de l'azote.

Ces deux raisons conjuguées font que le sarclage-binage des céréales est particulièrement intéressant en agriculture biologique, il peut se pratiquer, en gros avec trots types d'appareils:

la herse

le hersage des céréales au printemps est une vieille technique traditionnelle qui garde toute sa valeur; elle présente cependant l'inconvénient de risquer d'abîmer certaines plantes fragiles comme l'avoine; sur le blé, son effet est généralement bénéfique.

les bineuses ce vent les outils les plus perfectionnés pour le sarclage binage des céréales; elles peuvent être montées à l'arrière du tracteur (deux hommes nécessaires) ou à ['avant (le conducteur du tracteur peut travailler seul); il en existe divers modèles: consulter le «Guide Écologique des Fournisseurs» de ['association N. & P. en ce qui concerne les adresses de fabricants.

On peut les munir de socs sarcleurs de dimensions variées selon l'écartement des rangs de céréales; à ce sujet notons qu'il existe deux possibilités: ou semer à écartement un peu plus grand que de coutume (environ 22 cm) ou semer en rangs jumelés (5 ou 6 cm entre 2 jumeaux et 22 à 24 cm entre les couples jumeaux). Noter qu'une meilleure aération est défavorable aux maladies du pied; chaque méthode a ses partisans, bien appliquées elles donnent toutes deux de bons résultats /à noter que l'interligne étroit entre les rangs jumeaux ne peut être biné et donc reste envahi d'adventices).

- le cultivateur à dents vibrantes

Dans certaines terres très caillouteuses où herses et bineuses ne peuvent donner de bons résultats le vibroculteur fait parfois du bon travail.

Intérêt et limites du sarclage-binage des céréales:

L'intérêt du sarclage-binage est évident, destruction des adventices et aération du sol. Toutefois sa mise en uvre est parfois délicate notamment:

- en année humide

- dans les terres caillouteuses

- dans certaines terres de limons battants où les herses ne pénètrent pas et les binages décollent des «lardons» sans sarcler ni biner, (dans ce type de terre il me semble que des essais avec rangs jumelés `et éléments bineurs rotatifs seraient à faire).

De plus il faut intervenir au bon moment c'est-à-dire lorsque les adventices vent encore à l'état de plantules; ce n'est pas toujours possible notamment lors des printemps humides,

Le binage en lui-mémé demande une certaine habitude mais n'est pas une opération compliquée ni longue: un homme seul avec une bineuse de 4 m montée à 1'avant du tracteur peut biner à peu près un hectare par heure.

Un problème particulier: la fumure de printemps

Les céréaliculteurs «biologiques» s'inquiètent souvent au printemps de voir leurs céréales apparemment végéter alors que celles des voisins pratiquant l'agriculture classique vent deux fois plus développées et deux fois plus verses et deux fois plus longues que les leurs (j'exagère un peu).

II convient cependant de remarquer que ce n'est pas toujours le cas, il arrive même que ce soit l'inverse lorsque le printemps est bon mais c'est tout de même rare.

Cette différence est d'autant plus nette que les conditions atmosphériques du printemps vent défavorables (froid et humidité) et que les terres sont lentes à se réchauffer l'apport d'azote rapidement assimilable sous forme chimique permet en effet d'échapper partiellement à ces mauvaises conditions en court-circuitant les phénomènes normaux du sol.

II faut tout d'abord se dire que la différence s'atténue au fur et à mesure que la végétation s'avance, le coup de fouet spectaculaire donné au départ par l'engrais chimique azoté ne se répercute pas intégralement à la récolte sous forme d'augmentation de rendement et la céréale «biologique» rattrape peu à peu son retard quand la saison s'avance; les conditions vent mémé inversées lorsque la céréale classique a versé.

Toutefois le problème peut etre réel lorsque la végétation de la culture est tellement lente que les adventices risquent de prendre le dessus et de compromettre définitivement la récolte; un printemps froid et humide gênant la pousse de la céréale (par manque d'azote), empêchant parfois le sarclage-binage et freinant en fait peu les adventices.

Dans ces conditions i'apport d'un engrais azoté peut etre utile; en agriculture biologique on a alors le choix entre un engrais organique et le nitrate de soude du Chili (toléré par le cahier des charges officiel de l'agriculture biologique mais pas par celui de Nature et Progrès).

Si on choisit un engrais organique il faut bien prendre un engrais à action rapide; certains agriculteurs se trompent en effet à ce sujet, ils apportent au printemps un engrais à action lente qui ne donne alors pas un bon résultat car il est fait pour être enfoui en automne ou en hiver; donc bien demander au fabricant de fournir une spécialité à action rapide /guano par exemple).

On peut également choisir le nitrate de soude naturel du Chili et apporter, si possible en deux fois, 100 à 200 kilos/hectare (au total ).

Précisons toutefois que le nitrate de soude est un engrais naturel mais très soluble et que son utilisation constitue donc une entorse aux principes de base de l'agriculture écologique; il faut donc veiller à ne l'apporter qu'en période de conversion si possible et, dans les autres cas, lorsque son utilisation apparaît vraiment indispensable lors de très mauvaises conditions; il ne faudrait pas qu'il devienne une solution de facilité habituelle. Précisons que l'emploi de nitrate de soude du Chili n'est pas, pour le moment du moins, autorisé par les divers Cahiers des Charges «biologiques».

Par contre, il est parfaitement conforme au Cahier des Charge: d'apporter un engrais organique (sans excès).

On peut également si le sol est suffisamment portent, apporter une fine couche de compost; I'apport de purin composté ou largement étendu d'eau est également une excellente solution mais possible seulement sur terrain sain /ou alors sur sol gelé).

Les engrais verts

Ils doivent avoir leur place dans la rotation; on peut schématiquement distinguer trots types d'engrais verts en céréaliculture: les engrais verts intercalaires, les légumineuses associées et les têtes de rotation.

La tête de rotation est une légumineuse ou une prairie temporaire, plus rarement une autre culture; on a intérêt, dans la limite des contraintes économiques, à la faire curer le plus longtemps possible et a la faucher et mulcher le plus complètement possible.

Les légumineuses associées aux céréales en cours de rotation constituent un engrais vert intéressant en raison de l'azote et de la matière organique qu'elles apportent.

Les engrais verts intercalaires vent semés après la moisson et fauchés et mulchés avant le semis de la céréale suivante; ils vent intéressants pour apporter de l'humus et des éléments nutritifs, activer la vie microbienne et favoriser la lutte contre les adventices, ce vent généralement des crucifères (colza, moutarde, navette, ...), parfois des légumineuses (trèfle incarnat...); à noter que sur terre propre où le déchaumage après )a moisson ne s'impose pas on peut semer directement l'engrais vert sans travail du soi sur les chaumes puis épandre ensuite une couche assez fine de fumier ou, mieux, de compost, ainsi que les engrais minéraux que réclame le sol; si on a le temps on fauche ensuite les chaumes assez ras; en période normalement humide une telle façon de faire améliore considérablement la structure et la vie microbienne du sol.

L'idéal est de pouvoir faire alterner une légumineuse engrais vert et une crucifère engrais vert; c'est possible à condition de faire suffisamment de céréales de printemps; exemple:

Luzerne (tête de rotation): Blé d'hiver - colza intercalaire - avoine de printemps avec trèfle blanc associé: esourgeon - colza intercalaire - blé de printemps avec trèfle associé, etc...

Pour avoir des données plus précises sur l'utilisation des engrais verts, lire «Nourriture du sol et engrais verts » par J.M. Roger et La conversion à l'agriculture biologique» par J. Pousset (décurrents de l'association Nature et Progrès).

Attention au tréflé violet semé sous couvert d'une céréale: en année et/ou sous climat humide il monte parfois plus vite que la céréale !

Une culture intéressante: les mélanges céréaliers.

La culture des céréales en mélange n'est plus pratiquée en agriculture classique, elle était pourtant autrefois une technique agricole traditionnelle; certains agriculteurs pratiquant l'agriculture biologique sèment régulièrement des mélanges de céréales et ifs obtiennent généralement d'excellents résultats.

On associe généralement des graminées (blé, avoine, seigle...) avec des légumineuses (vesce, pois...); de te)s mélanges présentent de nombreux avantages sur lesquels nous ne nous étendrons pas ici: rendements supérieurs, étouffement des adventices, amélioration de la fertilité du sol, excellent mélange de graines pour les animaux, etc...

Leur seul inconvénient réside parfois dans la difficulté de leur commercialisation car ils ne peuvent être destinés qu'aux animaux, si l'agriculteur n'a pas de bêtes il lui faut trouver un débouché à l'extérieur, ce qui n'est pas toujours facile. Il faut que les agriculteurs pratiquant l'agriculture biologique se concertent pour pouvoir éventuellement échanger des productions; lorsqu'ils seront mieux organisés les céréaliers pourront plus facilement écouler des mélanges dans des régions d'élevage et les éleveurs trouveront plus facilement ce qui leur convient.

Les types de mélanges possibles vent très nombreux, c'est à chacun de trouver celui qui convient le mieux à son sol; on pratique le plus souvent des mélanges du genre vesce-avoine ou vesce seigle ou pois-avoine ou pois-avoine-orge-blé ou pois- avoine seigle, etc... (cf. fiche n° 24)

Remarque importante: il ne faut pas installer une prairie sous un mélange céréalier car elle risque d'être étouffée.

La qualité des semences est importante

On sous-estime trop souvent en agriculture biologique la qualité des semences et des plants qu'on utilise; c'est une erreur car seuls des plants et graines ayant une bonne vitalité peuvent donner de bons résultats; si on est obligé de mettre en terre des semences classiques, il faut s'efforcer de produire ensuite ses propres graines car seules des semences «régénérées» à bonne vitalité, peuvent permettre aux techniques de l'agriculture écologique d'être pleinement efficaces. Il faut toutefois reconnaître que de nombreuses observations restent à faire dans ce domaine mal connu .

Copyright © 199.. Nature et Progres

 


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